Déclaration de Monsieur le Gouverneur Mohammed Laksaci au Comité Monétaire et Financier International

18 avril 2015

Déclaration de Monsieur Mohammed Laksaci Gouverneur de la Banque d’Algérie au Comité Monétaire et Financier International Au nom de l’Afghanistan, l’Algérie, le Ghana, la République Islamique d’Iran, le Maroc, le Pakistan et la Tunisie

Je saisis cette opportunité pour exprimer notre appréciation à Monsieur Tharman pour la qualité de sa présidence du CMFI et souhaiter chaleureusement la bienvenue à son successeur, Monsieur Agustin Cartsens, bien connu de nous tous. Nous nous réjouissons de travailler ensemble, sous sa présidence, pour répondre aux attentes des membres de notre institution en ces temps difficiles.

Dans un environnement de plus en plus volatil, la reprise de l’économie mondiale s’est poursuivie, bien qu’à un rythme modéré et inégal, reflétant une légère reprise de la croissance dans les économies avancés et un rythme moindre mais toujours solide de croissance des économies émergentes et en développement. La chute drastique des prix du pétrole et, dans une moindre mesure, la baisse des prix des autres produits de base, ont eu un impact significatif sur l’économie mondiale, avec des effets différenciés sur les pays exportateurs et les pays importateurs de pétrole. Bien qu’il soit attendu que la croissance se raffermisse en 2015, la reprise demeure trop frêle pour mettre l’économie mondiale sur un sentier solide et réduire le chômage. Les risques sont plus équilibrés que par le passé mais des risques à la baisse importants persistent. Les travaux du FMI sur la croissance potentielle soulèvent des préoccupations quant aux perspectives de croissance à moyen-terme dans tous les pays et nous sommes dans l’attente de raffinement de l’analyse, y compris une évaluation plus élaborée de l’impact des récentes réformes structurelles.

Aux Etats-Unis, le rythme de la croissance continue à s’affermir et s’est traduit par une création soutenue d’emplois, pendant que dans la zone euro, des signes bienvenus d’une reprise naissante se font jour, soutenus par la baisse des prix du pétrole et la dépréciation de l’euro. Bien que les fragilités dans cette zone demeurent, y compris en relation avec la très faible inflation, le récent lancement d’achat d’actifs par la BCE augure de perspectives de reprise et d’atténuation des risques de déflation. Dans les pays émergents, la croissance poursuit sa décélération après les pics enregistrés les années passées, avec des variations selon les pays reflétant des circonstances spécifiques et des facteurs géopolitiques.

Néanmoins, les pays émergents et en développement continuent à compter pour l’essentiel de la croissance mondiale.

La région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MOAN) continue à faire face à des défis sans précédents émanant des conflits régionaux et de considérations sécuritaires. Bien que la chute 2 des prix du pétrole ait un impact positif sur les pays importateurs de pétrole, la plupart des pays exportateurs sont amenés à utiliser leurs épargnes pour adoucir l’impact négatif de cette baisse sur la dépense publique et la croissance. Malgré ces défis, il est quelque peu réconfortant que la croissance globale dans la région soit projetée à 3 % en 2015 et à 3,7 % en 2016.

Au vu des nombreux défis auxquels fait face l’économie mondiale, nous apportons notre soutien à l’Agenda Global de politiques de la Directrice Générale , qui met en avant des objectifs et des politiques visant à soutenir la croissance et l’emploi, à renforcer la stabilité financière et la résilience aux chocs, à promouvoir l’inclusion et l’égalité des opportunités économiques, y compris pour les femmes. La responsabilité première en matière de conception et de mise en œuvre de politiques appropriées pour faire face aux défis spécifiques à chaque pays relève de chacun de ces pays, mais au vu de l’intégration de l’économie mondiale, il est nécessaire de prendre en considération les débordements transfrontaliers des politiques internes. De ce fait, nous attachons une grande importance au rôle de coordination du FMI et sa mission de surveillance aussi bien au niveau bilatéral qu’au niveau multilatéral.

Soutenir la demande interne demeure crucial dans les économies avancées afin de conforter la reprise. Cela requiert la poursuite de politiques monétaires accommodantes, le renforcement des mécanismes de transmission de la politique monétaire et une communication appropriée en matière d’annonces de politique monétaire et ce, afin d’atténuer des effets de débordements potentiellement déstabilisateurs. Les politiques budgétaires doivent être également soutenir davantage la croissance et l’emploi, tenant compte de la disponibilité de capacités budgétaires et des progrès en matière de viabilité de la dette publique. S’attaquer à l’héritage de la crise dans le secteur financier, notamment dans la zone euro, aidera à améliorer le fonctionnement des marchés de crédit et à stimuler la demande et l’activité économique du secteur privé.

Les économies émergentes et en développement font face également à de nombreux défis, y compris le renforcement de la résilience de leurs économies aux chocs émanant de la normalisation de la politique monétaire dans les pays avancés, notamment en termes de resserrement des conditions de financement, de volatilité accrue des flux de capitaux et de mouvements abrupts des taux de change. La combinaison de politiques nécessitera un calibrage entre soutenir la croissance, contenir l’inflation, accumuler des coussins
budgétaires et externes, renforcer la stabili financière et les marchés internes de capitaux. Le renforcement du cadre budgétaire et l’amélioration du climat des investissements sont déterminants pour l’amélioration de la confiance des investisseurs.

Bien qu’ils continuent à enregistrer une croissance robuste, les pays en développement à faibles revenus ne sont pas immuniser contre des débordements émanant d’une faible croissance dans les pays avancés et émergents ainsi que de la volatilité des prix des produits 3 de base. De plus, ces pays font toujours face aux défis liés à la réduction de la forte pauvreté, à la création d’emplois et à l’amélioration des indicateurs sociaux. Cela met en avant l’importance de politiques budgétaire pro-croissance, axées sur le renforcement de la mobilisation de revenus, l’amélioration de la structure de la dépense publique pour favoriser l’investissement en infrastructure et des dépenses en faveur des pauvres, la réforme des subventions de l’énergie et la rationalisation des dépenses courantes. Ces politiques, cependant, ne génèreront pas les résultats attendus sans un soutien financier externe approprié et nous sommes dans l’attente de la contribution du FMI aux prochaines conférences sur le financement du développement et sur le changement climatique. Nous saluons la mise en place du fonds fiduciaire pour faire face aux catastrophes (Catastrophe Containment and Relief Trust), qui a déjà été utilisé pour soutenir les pays affectés par l’épidémie d’Ebola, et appelons la communauté internationale à alimenter adéquatement ce fonds en ressources. Nous appelons également à une mise en œuvre flexible de la politique de limites d’endettement et ce, afin d’aider les pays membres à compléter les ressources financières concessionnelles externes par des financements aux conditions de marché aux fins de faire face à leurs besoins en infrastructure et autres besoins de développement, tout en préservant la viabilité de la dette extérieure.

Le document de Perspectives Economiques Mondiales apporte une évaluation exhaustive de l’impact des faibles prix du pétrole sur l’économie globale ainsi que sur les économies de groupes de pays spécifiques. Nous saluons le travail et adhérons globalement aux conseils différenciés adressés aux pays producteurs et aux pays importateurs de pétrole pour faire face aux effets de cette baisse des prix. Nous encourageons le FMI à entreprendre des travaux plus analytiques dans ce domaine pour renforcer la pertinence des conseils. L’assistance technique du FMI serait utile dans le cadre de la réforme des subventions et du renforcement des cadres budgétaires afin de préserver la politique budgétaire des fluctuations des prix du pétrole.

Nous réitérons notre appel à la ratification et l’entrée en vigueur des réformes de 2010 relatives à la gouvernance du FMI et aux quotes-parts, comme nous réitérons notre appel à l’accélération des actions vers un accord sur une formule révisée du calcul des quotes-parts et sur la quinzième révision générale des quotes-parts. Dans l’intervalle, nous appelons le Conseil d’Administration du FMI à poursuivre la recherche d’une solution intérimaire qui ferait converger, de manière significative, les quotes-parts des pays membres vers les niveaux convenus dans le cadre de la quatorzième revue.